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Signification d'une requête devant les juges du tribunal d'Orthez (concerne M. Giron Desmarest et la commune de Saint-Médard)

  • Date: 11/04/1823
  • Lieu: ?

[La transcription peut comporter des erreurs]


À Messieurs les juges du tribunal d'Orthez.



Expose le sieur Giron Desmarest curé de St Médard, qu'il doit se défendre contre une attaque bien pénible pour un homme de son état. Ce sont ses propres paroissiens qui cherchent à le dépouiller d'une propriété qu'il n'avait acquise que par suite de son amour pour eux, et dans l'objet de se les attacher de plus en plus, en leur donnant des gages de sa stabilité dans cette paroisse.
Quelle cause a pû amener une attaque aussi extraordinaire ? L'expt eut il réellement perdu l'affection de ses paroissiens ? S'il en était ainsi, ce procès n'aurait pas lieu; l'expt fuirait bien loin d'une commune à laquelle il aurait donné des soins inutiles, et dans laquelle il se verrait hors d'état de faire le bien, qu'un vrai ministre de la religion désire produire.
Mais il demeure à l'expt une satisfaction qui peut soutenir son courage. On sait que dans bien de communes, l'esprit du maire qui les administre, ne représente pas du tout l'esprit des administrés. Vainement chercherait-on quelque chose de représentatif dans le mode de leur nommination: hors les communes où un mérite éclatant, une éducation plus perfectionnée, où une plus grande garantie résultante de l'élévation de la fortune, servent de guide pour les choix à faire, Quelle que soit la bonne volonté d'un préfet nomminateur; comment pourrait-il s'assurer de faire un choix assuré, parmi des hommes obscurs et inconnus ? L'intrigue, l'ambition sont assez généralement devenues la religion des français; surtout parmi les hommes qui n'ont pas pû parvenir à une certaine élévation d'âme; fruit le plus ordinaire des connaissances et de l'éducation.
Jetons les yeux sur la plupart des Mairies des campagnes, hors les communes qui ont eû le bonheur de trouver dans leur sein des hommes d'un rang élevé au dessus de celui des paysans; Vous y trouverez à peuprès en mil-huit-cent vingt trois, les mêmes hommes qu'en 1793. Leur fortune s'est accrue pendant ce long intervalle, et par suite leur considération au milieu des pauvres Campagnards. L'exercice des fonctions publiques qu'ils ont longuement occupées les a rendus habiles, et surtout audacieux. L'effet de cette habileté, de cette audace, et par suite d'une adroite intrigue, est de les faire ramper à droite, autant qu'ils sont oppresseurs à gauche, et vils dans leur ménage et au milieu de leurs administrés. Voilà le fidelle tableau de bien des maires de campagne
L'expt demande pardon au tribunal de l'amuser par une aussi longue dissertation, alors qu'il ne serait question que de défendre sa cause. Mais on sent bien que le curé d'un village, qui a le malheur de plaider contre le maire de sa paroisse, soi-disant au nom des paroissiens; ne peut pas se présenter avec un langage ordinaire: il ne doit pas plaider, ou il doit aborder des juges respectables qui sont les premiers protecteurs de la religion et des moeurs, avec une sorte de majesté, qui est le fruit naturel du sentiment de son bon droit et de sa supériorité: sentiment qui le met nécessairement à une certaine distance des antagonistes qu'il doit forcément combattre. Voyons si les faits de la cause vont justifier ce débat important. L'expt se flatte que lorsque le tribunal les connaîtra; il ne voudra pas le mettre en parallèle avec son antagoniste.
Faits
Avant 1736, le presbitère de St Médard dut être incendié. Il résulte d'un acte du dix sept juin, 1736, que Mr le maire a fait signifier en tête de son assignation, que la dame de Sallette alors seigneuresse et patronne de St Médard, s'était obligée de faire construire une maison presbitérale sur l'ancien sol de celle incendiée à la place des héritiers d'un sieur Pérés, ci-devant curé de la dite commune, qui avait incendié la maison presbitérale précédente; lesquels héritiers avaient stipulé de la dite dame, on ne sait pourquoi ni comment, qu'elle fournirait la dite maison à la commune en leur lieu et place.
Il parait aussi du même acte, qu'en conséquence de cette obligation, la dite dame de Sallette aurait proposé à la commune une maison appelée Du hau, et que la commune l'acceptait et abandonnait de son côté à la dite dame le sol et place de l'ancien presbitère.
Mais il parait aussi de cet acte que les parties craignaient d'éprouver des inquiétudes sur cette propriété; c'est pourquoi il y fut dit que les habitans n'acceptaient cette maison, qu'en la dite dame se chargeant de garantir la vente de tous les évènemens qui pourraient survenir.
2° Il parait en effet d'un autre acte aussi signifié par la commune du vingt huit octobre mil sept cent trente cinq, que la dite dame de Sallette ou la commune fut tellement troublée dans la possession de la d. maison qu'elle dut se pourvoir devant le sénéchal de St Sever, et par suite devant le parlement de Bordeaux pour se faire réintégrer dans la dite possession; qu'elle y fut réintégrée, et qu'elle sommait la commune de l'accepter de nouveau, et d'y installer Mr le curé, avec cette déclaration remarquable dans cet acte, que la dite dame sommait d'autant plus vivement la commune de prendre possession de cette maison, qu'elle ajoutait qu'elle leur faisait la dite sommation, pour éviter toute sorte d'incident.
3° Malgré cela il parait que la commune ne dût pas accepter la dite maison, à cause des troubles, car nous verrons bientôt qu'en mil sept cent cinquante deux, elle n'appartenait ni à la dame Sallette, ni à la commune, ni au curé, ni aux héritiers Perés: et on voit dans cet acte que Mr le Jurat à qui il était signifié par un notaire, en demanda copie, sans doute pour en faire des usages en consultation, réponses ou autrement.
4° Il parait aussi d'une cession du dix sept décembre 1752, retenue de Denjuin notaire, enrégistrée, qui sera signifiée avec la présente, qu'il dut réellement y avoir contestation, entre la dite dame de Sallette et la commune, au sujet de ce remplacement de la maison presbitérale, puisqu'il y est parlé d'un jugement rendu par Mr de Labore intendant par lequel la dite dame était tenue de payer annuellement aux Jurats de St Médard, une somme de vingt livres, pour raison d'une bâtisse qu'elle était obligée de faire.
5° On voit par là que vraisemblablement, l'obligation de la dame de Sallette fut convertie en une rente annuelle de la dite somme de vingt francs. Voyons maintenant ce qui dut se passer ensuite d'après les titres que l'expt va analyser.
6° Il parait de la cession sus-mentionnée du dix sept décembre mil sept cent cinquante deux, et d'un contrat de vente du quatre février 1753, que cette maison Du haü que la dame de Sallette achetait en 1736 des héritiers Péré pour la livrer à la commune, mais pour laquelle elle avait été troublée, et que la commune ne voulait plus acheter à cause de ce trouble, appartenait en 1751, à un sieur Laurisson qui l'avait achetée de Cathérine d'arras d'Orthez; celle-ci en avait vraisemblablement contesté la propriété aux héritiers Pérés et leur avait gagné le procès; ce qui explique le trouble fait à la dame Sallette, lorsqu'elle l'achetait des dits héritiers Pérés.
Quoiqu'il en soit, il est positif d'après ces deux actes, qu'avant 1751, la d. maison du hau, appartenait au sieur Laurisson, et que la dame Salette avait obtenue de Mr l'intendant que son obligation de faire la bâtisse d'un presbitère sur l'ancienne place de celui qui avait été incendié, fut convertie en une rente de vingt francs; et que par contrat du onze janvier 1751, cette dame colloqua la somme de quatre cents francs, formant le capital de la dite rente sur le dit Laurisson, qui dut s'obliger par le même contrat de vendre la dite maison du hau, pour le presbitère de la commune, que celle-ci qui devait apparemment fournir le surplus de la somme nécessaire pour cet achat, cessa d'en faire l'acquisition; qu'alors Mr le Curé Dauga, désirant en faire l'acquisition pour son propre compte, se fit céder par la dame Sallette la somme de quatre cents francs, colloquée sur la dite maison, par l'acte du dix sept décembre 1752, et que par autre acte du sept février 1753, il en fit réellement l'acquisition des mains du dit Laurisson pour le prix de sept cent quarante sept francs, sur lequel on compensa les quatre cents francs que la dame Sallette avait cédé au dit Dauga prêtre; et le sieur Dauga acquéreur se réserva en terme exprès que « par le dit achat, il n'entendait pas en rien se nuire ni préjudicier à demander à la communauté la bâtisse d'un presbitère; qu'elle ou la dite dame étaient tenues de lui faire bâtir, n'étant tenu de son côté, suivant la dite cession que de payer aux jurats de la dite communauté, la somme de vingt livres pour le louage du sus dit presbitère; »
On voit par ce contrat sur la clarté duquel il ne demeure rien à désirer, qu'à partir du dit jour, quatre février 1753, le sr Dauga devint propre incommutable de la maison du hau.
On voit ensuite par un contrat du quatorze janvier 1771, que le dit Daugar étant appelé à la cure du bosc d'arros, il vendit cette maison au sieur Desclaux qui le remplaça dans la cure de St Médard, pour une somme de neuf cent soixante seize francs.
Ce contrat par lequel le d. Desclaux devenait acquéreur de cette maison, bien en son propre et privé nom, permettrait cependant de croire que la commune égarée vraisemblablement par le contrat de 1736, manifestait toujours quelque prétention sur cette maison Du hau; car on y trouve une stipulation de garantie plus qu'ordinaire. On y voit d'abord qu'à suite de la clause par laquelle Desclaux acquéreur, s'obligeait de payer à la commune la somme de quatre cents francs, ou la rente de vingt francs, en décharge de Daugar vendeur, on ajouta: « Et le dit sieur Daugar sera tenu de garantir le dit sieur Desclaux, qu'il ne lui sera demandé que la dite somme de quatre cents francs. »
Et à la fin de l'acte, on trouve encore la clause suivante: « Le dit Daugar la lui vend (la maison), quitte et décharge de toutes dettes et hypothèques; et en cas de procès trouble ou empêchement en la possession, s'oblige de lui en porter toute éviction et garantie. »
7° Néanmoins la commune mieux conseillée, dut renoncer sans doute à toute mauvaise prétention sur la dite maison, si tant est que ce fut de sa part qu'on craignit les troubles et procès, car le sieur Desclaux jouit paisiblement de la dite maison, jusqu'au quatorze janvier 1782, que quittant à son tour la paroisse de St Médard, il la vendit pour quinze cents francs au sieur Dubosc son successeur, que celui-ci lui paya, sauf la somme de quatre cents francs, qu'il promit à son tour de payer à la commune en décharge de son vendeur
8° Ce nouvel acquéreur en jouit aussi fort paisiblement depuis le dit jour, quatorze janvier 1782, jusqu'au cinq vendemiaire an 14, où il s'en dépouilla en faveur de l'expt; et il dut avoir payé à la commune, la somme de quatre cents francs dont il était grevé; car on voit dans le dit contrat du vingt cinq vendemiaire an quatorze, ou dix sept octobre 1805, qu'au lieu de stipuler de l'expt comme dans les contrats précédents, qu'il paierait à la commune, la somme de quatre cents francs, ou la rente de vingt francs, il y fut dit au contraire que cette vente lui était faite pour le prix de « treize cents francs, franche et quitte de toute dette et hypothêque, avec la garantie de droit pour la sûreté de laquelle le sieur Duboscq vendeur, obligea et hypothêqua tous ses biens et causes »
L'expt fit transcrire son titre au bureau des hypothêques d'Orthez, le quinze avril mil huit cent six; et depuis cette longue épôque, il en a toujours joui paisiblement, jusqu'au vingt sept janvier dernier, où le sieur Laborde maire, dont le despotisme est connu, et qui a, dieu merci, fait éclatter sa haine contre l'expt et ses parens en d'autres occasions, après avoir surpris par ses mensonges une autorisation de Mr le Préfet qui neanmoins ne l'authorisait à revendiquer qu'une partie de ladte Maison, il le fit assigner devant le tribunal, pour voir déclarer la commune propriétaire du presbytère en totalitté, avec réserve de demander des dommages-intérêts, en cas de résistance de la part de l'expt
On voit par là, combien il est malheureux d'avoir à plaider contre le sieur Laborde en nom qualifié, puisqu'il ne veut pas laisser à son antagoniste la faculté de défendre une propriété légitimement acquise, que sous des peines dont il le menace.
9° Nous avons dit plus haut que l'expt a toujours joui paisiblement de la maison par lui acquise depuis le dix sept octobre 1805, jusqu'au vingt sept janvier dernier. En effet, on voit dans les états de souscription signés par tous les habitans de la commune et délibérés par le conseil général, qu'ils étaient faits pour les paiemens de supplément, indemnité de logement de Mr le prêtre desservant, la commune ne reconnaissait elle pas par là, que la maison de l'expt n'était pas presbitérale, et que la dite commune n'y avait aucune prétention ?
Quoiqu'il en soit, Mr le Maire, prenant dans son assignation, et surtout dans la délibération de la commune, dont il fut vraisemblablement le rédacteur, prenant (avons nous dit) le ton de l'insulte, accuse non seulement un, mais quatre prêtres qui desservirent succéssivement la commune, d'avoir abusé d'une posséssion essentiellement précaire, pour s'approprier la maison en question, à l'insçu des habitans de la commune, et d'avoir par un intolérable abus de cette possession, et un oubli de tous les principes d'équité, vendu, le sr Dauga au sr Desclaux; le sr Desclaux au sr Duboscq; et le sr Duboscq à l'expt; avec cette précision néanmoins, que la vente faite au dernier, ne comprenait que la portion du vendeur sur l'immeuble; d'où Mr le maire conclut que MM les desservans qui se sont succédés à St Médard, tout en reconnaissant que les habitans avaient des droits sur le presbitère, ont présenté ces droits, tantôt comme un titre de créance, tantôt comme un titre de propriété présumé; qu'il en résulte que le desservant actuel, n'a pas acquis la totalité du presbytère; et attendu qu'on est toujours censé posséder lorsqu'on détient la chose par quelqu'un qui en jouit au nom du propriétaire, les habitans de la commune n'ont, dès lors, jamais cessé de posséder la maison presbitérale, puisqu'ils en jouissaient en la personne du desservant, qui l'occupait ainsi comme leur valet à gage.
Tels sont les moyens sur lesquels Mr le maire a fondé son assignation. Qui ne serait édifié de la décence et de la délicatesse de son style ! Cet adre y ajoute encore que les biens des communes étaient imprescriptibles sous l'empire des anciennes lois; et qu'il ne s'est pas écoulé un assez long espace de temps depuis le code civil, pour que les habitans eussent pû perdre par la prescription la proprietté de leur presbitère.
Discussion
Cet exposé des moyens de l'adre nous appelle à examiner 1° si l'adre produit des titres suffisans, pour établir que la commune aie jamais eû la propriété de la maison du haü, qui est en contestation. 2° si au contraire les titres produits par l'expt, n'établissent pas que la commune n'en fut jamais propre, mais bien les desservans qui se sont succédés dans cette paroisse depuis mil sept cent cinquante deux. 3° si l'expt à reconnu que la commune avait des droits sur cette maison, par la clause où il est dit qu'il achetait la part et portion de la maison, jardin, basse cour et grange, formant le presbitère de St Médard. 4° si dans tous les cas l'expt n'aurait pas acquis par la prescription la pleine propriété de la ditte maison franche et libre de tous les prétendus droits de la commune. Reprenons.
§= 1er
Sur les titres de la commune
Les titres sur lesquels l'adre se fonde, consistent en deux actes du dix huit juin, et vingt huit octobre 1736, retenus de Morlanne notaire de St Medard, que l'adre a produit en tête de son assignation. Par le premier de ces titres, il parait qu'un sieur Pérés qui vraisemblablement avait été curé de ce village, ayant incendié le presbitère, et la commune, éxigeant de ses héritiers qu'ils le rebâtissent sur la même place, la dame de Sallette s'était obligée, on ne sait pourquoi, ni comment, envers les dits héritiers Pérés, de les dégager envers la commune de leur obligation de rebâtir ce presbitère, et qu'au lieu de faire cette reconstruction sur l'ancienne place, la dite dame de Sallette acheta une maison appelée Darras, et proposa à la commune de la lui abandonner pour tenir lieu de celle qu'elle devait reconstruire: Que la commune après avoir examiné cette maison, agréa la substitution qui lui était proposée, en part la dite dame se chargeant de garantir la dite vente de tous les évènemens qui pourraient survenir au sujet de la dite maison.
Cette dernière clause semble annoncer que la commune connaissait quelque circonstance qui rendait incertaine la paisible possession, ou peut être le transport de la propriété de la dite maison
En effet, il résulte du second titre produit par l'adre, que lors apparemment que la dame Sallette, ou la commune pour elle, voulut se mettre en possession de la maison Darras en question, elle dut éprouver quelque trouble sérieux de la part de quelques particuliers (y est il dit, qui n'y sont pas désignés) il y eût une instance criminelle au sénéchal de St Sever, et au parlement de Bordeaux, par suite de laquelle cette dame avait été rétablie en la possession de la dite maison, qu'elle avait achetée, est il dit ici, aux héritiers Pérés, et moyenant ce retablissement, elle sommait les habitans de prendre la délivrance de cet immeuble, en conformité du Contrat du dix huit juin même année, par lequel les dits habitans avaient accepté la dite maison pour dégager la dame Sallette de l'obligation par elle contractée de rebâtir le presbitère.
Mais il ne parait pas du tout de ce contrat, comme nous l'avons dit plus haut, que les habitans eussent accepté la dite délivrance; au contraire, il parait que Mr le Jurat à qui la signification avait été faitte demanda copie de cet acte; ce qui n'eût pas été nécessaire, s'ils eussent voulu accepter la dite délivrance: Il n'eut été nécessaire dans ce cas que de répondre que les habitans l'acceptaient d'en faire dresser procès verbal, et d'entrer en possession.
Quoiqu'il en soit, nous disons que ces deux titres réunis, bien loin de former une preuve de la propriété de la commune sur la maison du haü achetée par l'expt, établissent le contraire
En Premier Lieu. Il est établi par ces titres, que ce n'était pas la même maison; car celle dont il est question dans les contrats de l'adre, s'appelait d'arras, et celle achetée par l'expt s'appelait dans tous les contrats produits, la maison du haü. La première suivant le second acte de l'adre, aurait été achetée aux héritiers Pérés; et celle de l'expt suivant ses contrats, aurait été achetée au sieur Laurisson. La première, enfin la maison Darras était si peu la maison du haü, achetée par l'expt, qu'elle est dite dans ce second contrat de l'adre, être joignante à la dite maison du haü.
En second Lieu. Ce qui prouve que le premier contrat produit par l'adre n'eût pas son exécution, c'est 1° Que la maison y mentionnée ne se trouve en mains de la commune, et que rien ne prouve qu'elle en ait joui. Cependant si la commune l'eût réellement achetée et possédée, il devrait y avoir mille documens qui établiraient cette possession; elle eût été portée sur le censier comme appartenant à la commune. Il se trouverait parmi les papiers et les délibérations de celle-ci des états de réparation, et des quittances du paiement des impositions &a &a
En troisième Lieu. Suivant les principes régnant en mil sept cent trente six, épôque des contrats de l'adre, et même suivant les principes d'aujourd'hui, le contrat de vente ne suffit pas pour établir le transport de propriété. traditionibus dominia rerum, non nudis pactis transferuntur. En effet, le simple contrat de vente, porte l'article 1582 du code civil, est une convention par laquelle l'un s'oblige à livrer une chose, et l'autre à la payer. Ainsi à l'égard de l'acheteur et du vendeur, la vente est parfaite, comme le porte l'article 1581 par le seul contrat. Mais à l'égard des tiers ou des effets qu'elle doit produire, ce n'est que par la délivrance qu'elle est consommée. C'est ainsi que se concilie la contradiction qui parait régner entre les lois romaines, dont les unes portent que la vente n'a pas lieu sans la tradition; et les autres qu'en matière de vente, le simple consentement suffit: consensu fiunt obligationes inscriptionibus et venditionibus.
« Il faut distinguer (dit Domat sur l'article précité) dans le contrat de vente, deux sortes de dégrés d'accomplissement ..... Le premier est celui dont il est parlé dans l'article 2 de la section 2e (ainsi conçu: La vente s'accomplit par le seul consentement, quoique la chose ne soit pas délivrée): et la seconde est celui dont il est parlé dans cet article dix (qui porte: que le premier effet de la délivrance est que l'acheteur devient le maître de la chose vendue, avec le droit de jouir, user, et disposer). Leur différence consiste en ce que le simple consentement ne forme que l'engagement des contractans à exécuter réciproquement ce qu'ils se promettent; et c'est en ce sens que le contrat de vente est accompli par le seul consentement; mais il y manque un second accomplissement pour l'exécution de ces engagemens qui a cet effet; qu'au lieu que le contrat de vente sans délivrance ne rend pas l'acheteur maître et possesseur, et ne lui donne pas le droit de jouir, d'user et disposer de la chose vendue, mais seulement le droit d'en demander la délivrance. Cette délivrance et le paiement du prix consomment la vente, et le rendent pléinement maître et possesseur, ce qui était la fin du contrat de vente. »
Ce passage présente un sens clair et précis, et s'applique parfaitement à l'hypothèze de la Cause.
En Quatrième lieu. Ce qui prouve que le contrat du dix huit juin, par lequel la dame Sallette proposa à la commune, et celle-ci accepta la maison Darras n'eut pas son Execution c'est le second acte du vingt huit octobre même année, qui prouve que la commune n'en prit pas reellement possession, et que cette dame dut plaider sur sa propre possession; et lorsqu'elle eut gagné le procès, elle dut faire signifier cet acte à la commune: si celle-ci eut bien voulu prendre la dite maison, il n'eût pas été nécessaire de lui signifier des actes, ainsi il est évident que le procès soutenu par divers particuliers contre l'achat de leur seigneuresse au possessoire, dégouta la commune qui craignit vraisemblablement une nouvelle action au pétitoire. Ce qui le prouve, c'est que l'adre ne peut pas présenter un seul fait, un seul acte, pas même le plus petit chiffon de papier, qui prouve que la commune ait jamais joui.
En Cinquième Lieu. Ce qui prouve que le contrat du dix huit Juin 1736 n'eut pas son effet, c'est les quatre cents francs que la dame de Sallette fut ensuite condamnée par le jugement de Mr l'Intendant à payer à la commune, à raison de la dite bâtisse du presbytère.
Tout jugement suppose un procès. Il y eut donc contestation ensuite entre cette dame et la commune à ce sujet. La dame de Sallette ne pouvant plus délivrer la maison Darras, puisqu'elle lui était contestée, dût demander apparemment que son obligation de bâtir, fut convertie en une somme à payer; car si elle eut réellement délivré la maison Darras, comment y aurait on ajouté de plus l'obligation de payer cette somme ? Il est à observer que d'après le contrat du dix huit juin, la maison proposée par la dame Sallette devait valoir plus que son obligation de bâtir, puisque la commune devait lui abandonner l'ancienne place: Il n'est donc pas possible de supposer que Mr l'intendant l'eut condamnée à remettre de plus une somme de quatre cents francs, si elle eût réellement délivré la maison Darras.
Concluons de tout cela que les titres produits par l'adre ne prouvent pas que la commune ait reçu de la dame Sallette aucune maison, qui forme le presbitère actuel.
§e 2e
Sur les titres de l'expt
1° Nous avons déjà donné l'énumération de ces titres; et ils remontent de l'un à l'autre, jusqu'en l'année 1752. Ce sont quatre contrats du quatre février 1753, 14 janvier 1771, et vingt cinq vendemiaire an 14, tous translatifs de propriété à titre de vente, non de la maison darras, mais de la maison du haü, non achetée aux héritiers Pérés mais au sieur Laurisson.
Ces contrats furent passés a St Medard a castetabidon et a juren qui sont la même chose que St médard, communes voisines et dépendantes de la même seigneuresse, ainsi qu'on le voit dans les titres produits par l'adre: ces communes avaient un égal interêt à ce que l'expt et ses prédécesseurs n'usurpassent le presbitère qui leur aurait appartenu en l'achetant en leur propre nom: des habitans de ces communes assistèrent comme témoins à ces contrats: Les curés qui en firent successivement l'acquisition, ne le cachèrent pas à leurs paroissiens, non plus que les notaires qui les avaient retenus. On voit même que le premier fut insinué le quatorze février 1750, et le dernier transcrit au bureau des hypothèques le quinze avril 1806, ce qui donnait à ces deux contrats la publicité légale qui ne permet plus à personne d'en feindre, Cause d'ignorance. Tous ces dits contrats renferment vente pure et simple de la maison du haü. Comment serait-il possible de soutenir que l'expt qui a été mis par son contrat aux droits de tous ses prédécesseurs, ne fut pas légitime propriétaire de la dite maison ?
2° À ces titres fondamentaux de la sûre et légitime acquisition de l'expt, se joignent les états de souscription des habitans de St Médard, consentis pour payer à Mr le curé l'indemnité de son logement, états qui se concilient fort bien avec la réserve insérée dans quelques uns de ces contrats, portant que « par cet achat les curés acquéreurs n'entendaient pas se nuire a demander à la communauté la bâtisse d'un presbitère, qu'elle ou la dame de Sallette étaient tenues de lui faire bâtir. »
On ne voit pas comment d'après cela Mr le maire aurait pû concevoir seulement l'idée de contester à l'expt la légitime propriété de la maison par lui achetée il y a dix sept ans, s'il ne nous en eut appris lui-même le secret par son assignation, où il annonce se fonder principalement sur ce qu'il est dit dans le contrat de l'expt, qu'il achetait la part et portion de la maison, jardin, basse cour et grange, formant le presbytère de St Médard. Examinons quel peut être l'effet de cette clause
§ 3e
Sur les expressions du contrat d'achat de l'exposant.
1° L'adre pour faire abonder l'interprétation dans son sens, dénature la clause du contrat du vingt cinq vendemiaire an 14; il lui fait dire de mauvaise foi « Que la vente ne comprenait que la portion du vendeur sur l'immeuble, et infère de là que MM les desservans reconnaissaient que les habitans avaient des droits sur le presbitère. »
Rien de tout cela ne se trouve dans le contrat en question. Il y est bien dit il est vrai non en termes négatifs, comme l'adre le suppose, que l'expt n'achetait que la portion du vendeur sur l'immeuble vendu; mais qu'il achetait la part et portion de la maison, jardin, basse cour et grange, formant le presbitère de la dite commune, le tout autant en appartenait au dit vendeur, confrontant du Levant à jardin et vigne de Peiruc; du midi à chemin public; du couchant à maison et basse cour de Laborde Joanchère, adre, et du nord à chemin public. Telle est la teneur littérale de la clause. Voyons maintenant en quoi ces mots la part et portion peuvent nuire à l'expt, et en quoi ils pourraient profitter à la commune adre
En premier Lieu. C'est une règle constante de toutes les législations, que lorsque dans un contrat, il y a des clauses obscures et des clauses claires qui contredisent les clauses obscures, on doit préférer les clauses contraires, qui donnent un sens utile au contrat, et qui convient le plus à la matière du contrat (articles 1157 et 1161 du code civil.) Or ici on ne peut pas contester que ces mots, la part et portion ne présentent un sens absolument obscur. Car ils n'expliquent pas en quoi ni comment il y aurait eu deux parts de la maison en quéstion; ils n'expliquent pas quelle aurait été la portion non vendue; ils n'expliquent pas à qui aurait appartenu cette portion non vendue; et ils n'expliquent pas pourquoi le vendeur, maître de toute la maison du haut, suivant son contrat d'achat du quatorze janvier 1782, n'en aurait vendu qu'une portion ? Le sens de ces mots est donc tout à fait obscur er inintelligible.
En deuxième Lieu. Ces mots de la même clause: « formant le presbytère du dit St Médard, tout autant qu'il lui en appartient; et confrontant du Levant à jardin et vigne de Peiruc, du midi &a &a, ces mots, disons-nous, présentent un sens bien clair.
Ils expriment que l'expt achetait tout le presbitère, quoique suivant les mots précédens, ce presbitère ne fut formé que d'une part de maison qui n'est pas précisée, et dont on ne connait pas l'autre part; il y est bien exprimé que l'expt achetait tout le presbitère, puisqu'il achetait toute la part d'une maison qui formait le dit presbitère: il y est clairement exprimé que l'expt achetait tout ce qui appartenait au vendeur; et le vendeur était propriétaire de tout le presbitère, suivant son contrat de mil sept cent quatre vingt deux. Il y est exprimé enfin, que l'expt achetait tout ce qui était contenu entre le jardin de Peiruc, deux chemins publics, et la basse cour de Joanchère. Si l'adre trouve quelque part de maison au délà de ces confrontations, l'expt pourrait le lui abandonner pour la commune, quoiqu'il ne soit pas parlé d'elle dans le contrat en question.
Il est donc bien vrai que les mots du contrat qui transportent à l'expt tout le presbitère sont clairs et précis, et doivent l'emporter sur les mots, la part et portion qui sont si obscurs et ne présentent pas de sens ..
En troisième Lieu. « Les expressions qui ne peuvent avoir aucun sens (écrit Domat L. 1. te 1. Pe 2. art: 19) par aucune voie, sont rejetées comme si elles n'avaient pas été écrites. Loi 73, § 3 du reg. juris. »
Or ici, nous demandons quel sens il serait possible d'attribuer à ces mots la part et portion, de la manière dont ils sont placés dans le contrat du vingt cinq vendemiaire an 14 ? Voudrait on leur faire signifier qu'une autre autre portion de maison appartiendrait à la commune ? Mais il n'y est pas parlé de la commune; et nous ne voyons pas d'après les confrontations, qu'il y eut d'autre maison que le presbitère; et d'après le contrat, tout le presbitère aurait été vendu « la portion de maison (y est il dit) formant le presbitère, et non la portion du presbitère. »
Voudrait-on lui faire signifier que la dame de Sallette se fut réservé quelque portion du presbitère, à cause des quatre cents francs cédés à Mr Dauga ? Mais nous voyons par la cession du douze septembre 1752, que cette dame en fut intégralement payée.
Voudrait-on lui faire signifier que le sieur Laurisson, le sieur Dauga, le sieur Desclaux, ou le sieur Duboscq s'en fussent réservé non plus aucune partie ? Les contrats produits démontrent le contraire; et comme nous l'avons déjà dit, il est positivement établi que tout le presbitère fut vendu par le contrat du vingt cinq vendemiaire an quatorze ?
Les termes susceptibles de deux sens (porte l'article 1158 du code civil) doivent s'interprêter dans le sens qui convient le plus à l'intention des parties et à la matière du contrat; Ici l'intention de la partie achetteresse, était d'acheter un presbitère entier, et la matière du contrat était que l'achetteur eut le presbitère qui lui était vendu, tel que l'avait possedait son vendeur tel qu'il lui appartient (y est il dit). « Quotier (porte la loi romaine 80 de verb. obl.) in stipulatione ambigua est oratio; comodissimus est, id accipi, quo res dequâ agitur tuto sit. »
Posons donc pour certain que les mots: la part et portion, qui se trouvent dans les contrats du vingt cinq vendemiaire, doivent être considérés pour non advenus. Ainsi il demeure toujours que les titres de l'expt, lui donnent l'entière propriété de cet immeuble
Voyons maintenant si lors même que l'expt ne l'aurait pas par titre, il ne devrait pas l'avoir par prescription
§e 4e
Sur la Prescription
L'adre pour se mettre à l'abri de cette exception dirimante, allègue 1° Que les biens des communes étaient imprescriptibles sous l'empire des lois anciennes. 2° Qu'il ne s'est pas écoulé un assez long espace de temps, depuis le code civil
Si nous en avions besoin pour la défense de la cause, nous pourrions contester avantageusemt la première proposition de l'adre: mais comme il nous suffira pour le triomphe de la cause, d'établir la fausseté de la seconde. Nous ne chercherons pas à étendre davantage cette longue défense.
Dans cette seconde proposition, l'adre écrit que depuis le code civil, il ne s'est pas écoulé un temps suffisant pour la prescrition; Par là l'adre convient que s'il s'est écoulé un temps suffisant, la prescription est acquise.
Or pour établir cette vérité, nous n'avons qu'à rapporter les aticles 2227 et 2265 du code civil. Le premier dispose que la prescription court contre les communes. Aussi l'adre n'a-t-il prétendu établir leur imprescriptibilité que pour le temps antérieur à ce code
Mais la loi de ce code, relative à la prescription, remonte au quinze mars mil huit cent quatre; et l'article 2265 porte que celui qui acquiert de bonne foi et par juste titre, un immeuble, en prescrit la propriété par dix ans, entre habitans de la même cour royale.
Or, ici l'expt a acquis de bonne foi tout le presbitère; car il voyait et pensait que le sieur Dubosc son vendeur, en était propriétaire; et il ne voyait pas ni ne connaissait qu'il put y en avoir quelqu'autre propriétaire, en tout ni en partie; Il l'achetait par un juste titre, un contrat de vente; et quoi qu'il y fut parlé d'une portion de maison formant le presbitère, il n'en achetait pas moins tout le presbitère prétendu formé de cette portion de maison; il n'en achetait pas moins toutes les bâtisses, cour et jardin, contenues dans les Confrontations désignées.
L'expt a donc acheté avec bonne foi et juste titre; et il a joui depuis le code civil seulement, non pendant dix ans, mais pendant dix huit ans; il aurait donc prescrit dans tous les Cas la propriété de l'immeuble qu'on lui conteste
§ 5e
Sur les dommages-intérêts
La vengeance n'est pas sans doute une disposition qui désire se trouver dans l'âme d'un bon prêtre. Aussi l'exposant s'efforce-t-il d'en préserver son coeur. Mais le méchant ne doit il pas être réprimé, et la prudence n'exige-t-elle pas qu'on se prémunisse contre les atteintes de la haine ?
Ladre cet homme dangereux saisit toutes les occasions de se livrer à l'explosion de ses mauvais sentimens contre l'exposant.
Rappelons que l'adre soutient ce procès au nom des habitants contre leur voeu et contre leur intérêt par l'effet de ses intrigues.
Rappelons que l'adre cherche à avilir l'expt aux yeux de ses paroissiens; qu'il s'est permis dans la délibération du vingt et neuf juin mil huit cent vingt et deux, une foule de réflexions et d'expressions injurieuses jusqu'à traiter l'exposant de valet à gages.
Rappelons qu'en mil huit cent quinze, il se permit contre le neveu de l'exposant une dénonciation calomnieuse qui mit en danger sa vie; sa liberté, et son honneur.
Rappelons que par cette dénonciation et par ce mauvais procès, il va leur en couter des sommes considérables; Le tribunal sentira la nécessité de contenir cet homme par une juste repression.
L'exposant conclut: Débouter l'adversaire de sa demande, et le condamner personnellement en mille francs de dommages-intérêts, dont l'exposant faira tel usage que sa délicatesse lui prescrira, et aux dépens. nommant pour avoué Me Loustaunau.

Pour vingt rolle & vingt de Copie

Loustaunau avoué

L'an mil huit Cent vingt trois & le onze avril par moi huissier soussigné patenté n° 6 de la part de me Loustaunau avoué du sieur Giron Desmarets Curé de St medard signifié et baillé Copie de la presente requête et de la cession du dix sept Décembre mil sept cents Cinquante deux à me Bordenave avoué du sr Laborde Touron en qualité de maire de la dite Commune dans son étude parlant à son clercq

Saintmartin her

Enregistré à Orthez le quatorze avril 1823 fo 127 Vo c 2 Réçu cinquante cinq centimes.

L magnan


Du 11. mars 1823.
Requête pour le sieur Giron Desmarest, curé, desservant la commune de Saint-Médard.
Contre.
Le sieur Laborde maire de la dite commune

Loustaunau
Bordenave

N°10

Pièces du Procès du Desst De St Médard remises à Mgr l'Evêque le 26 mai 1824

rendues entre les mains de mr le Doyen d'arthez le 27. mai 1824.